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Le 6 juillet 2016, le Tribunal des professions (ci-après le « Tribunal ») a confirmé la décision du Conseil de discipline du Collège des médecins (ci-après le « Conseil ») dans le dossier du Dr. Nguyen en rejetant l'appel entrepris par le syndic adjoint ainsi que celui du Docteur lui-même[1].

Les faits menant à la plainte auprès du syndic concernent les interventions du Dr. Nguyen auprès d'une patiente âgée de 68 ans qui le consulte initialement pour des douleurs au genou droit et par la suite, pour des douleurs au genou gauche. Dans les deux cas, le Dr. Nguyen recommande à celle-ci une arthroplastie avec implantation d'une prothèse totale qui aura lieu en 2007 pour le genou droit et en 2008 pour le genou gauche.

La plainte comporte sept chefs d'infraction. Pour les deux interventions, le syndic adjoint reproche au Dr. Nguyen d'avoir fait défaut d'élaborer un diagnostic avec la plus grande attention, d'avoir fait défaut d'obtenir de sa patiente un consentement libre et éclairé et d’avoir procédé intempestivement ou prématurément à une intervention chirurgicale majeure et irréversible. Il lui est également reproché de ne pas avoir versé au dossier de la patiente les renseignements médicaux utiles.  Le Conseil le reconnaît coupable sur quatre des sept chefs d'infraction et lui impose une radiation temporaire de cinq (5) et quatre (4) mois à être purgée de façon concurrente ainsi qu’une amende de 1 000$.

Le syndic adjoint appelle de la décision sur la culpabilité. Il prétend que le Conseil aurait commis une erreur en motivant de manière insuffisante sa décision, en omettant de trancher la preuve contradictoire d'experts ainsi qu’en n'appliquant pas un même standard d'évaluation et d’appréciation de la preuve aux deux interventions du médecin. Renversant les arguments du syndic, le Tribunal affirme que la preuve d’experts administrée fait état de contradictions sur une question où il n'y a pas de consensus dans la profession. À cet égard, il rappelle l’existence d’une jurisprudence constante à l’effet qu’il n’appartient pas aux tribunaux de faire un choix entre deux écoles de pensée scientifique lorsque les deux sont raisonnables.

Quant à lui, le Dr. Nguyen appelle de la décision sur la sanction en arguant que le Conseil n’a pas motivé sa décision, que la sanction globale a pour but de punir, qu’il y a une absence de risque de récidive et finalement, que le Conseil n’a pas tenu compte ni de facteurs atténuants ni de l'harmonisation des sanctions. Le Tribunal conclut à l’échec de chacun de ces moyens d’appel et réaffirme, quant à l'harmonisation des sanctions, le principe voulant que « ces 'fourchettes' ne devraient pas être considérées comme des 'moyennes', encore moins comme des carcans, mais plutôt comme des portraits historiques à l'usage des juges […] tenus d'exercer leur pouvoir discrétionnaire dans chaque espèce »[2].

Nous retenons notamment de cette décision le rappel du principe selon lequel les tribunaux, en cas d'expertises contradictoires et après évaluation de la qualification des experts, n’ont pas à trancher les querelles scientifiques. De plus, il est intéressant de noter le rappel de la doctrine selon laquelle les « fourchettes » de peines traditionnellement imposées par les tribunaux ne sont pas une contrainte, mais bien de simples indicateurs qui guident les juges dans l'exercice de leur pouvoir décisionnel. 

[1]    Médecins (Ordre professionnel des) c. Nguyen, 2016 QCTP 117; Nguyen c. Médecins (Ordre professionnel des), 2016 QCTP 118.

[2]    R. c. Lacasse, 2015 CSC 64, par 57.